Après le dîner, elle aida sa mère à essuyer la vaisselle puis toutes deux s'installèrent au salon pour broder tandis que le père lisait un roman en fumant la pipe. Il devrait arrêter de fumer car des quintes de toux l'accomodaient souvent et le fatiguait, mais à quoi bon ? Il était borné et n'écoutait personne, que ce soit sa famille ou son médecin qui s'inquiétaient pour lui.
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Le lendemain matin, sous un ciel chargé et sans soleil, la jeune fleuriste se rendit au marché comme chaque jour, son panier en main. Elle aimait observer les vitrines des magasins, celles des échoppes et des artisans. Elle s'apprétait à traverser la rue lorsqu'un fiacre dévala soudainement vers elle. Surprise, elle eut un mouvement de panique et tomba sur la chaussée, échappa son panier qui attéri sur la route pavée et renversa les roses. Le vent éparpilla les pétales dans le ciel, au grand désespoir de la jeune femme qui n'avait plus rien à vendre. Elle perdit connaissance...
La portière du fiacre s'ouvrit et un homme en redingote noire et chapeau haut-de-forme descendit du marche-pied. C'était le galant monsieur de la veille. Son cheval s'était emballé, voilà pourquoi il se cabra et la bouscula. Le vieil aristocrate ranima la jeune femme doucement, elle se redressa en le toisant d'un regard triste. Désolé de l'incident involontaire, il lui présenta ses excuses. Il ôta son chapeau haut-de-forme pour lui parler, confus et géné. A cause de lui, elle n'avait plus de fleurs à vendre, toutes étaient âbimées et la plupart s'étaient envolées. Elle regarda le ciel sombre puis des larmes coulèrent sur son visage clair, son coeur se serra. L'homme l'aida à monter dans le fiacre. Elle hésita puis prit place sur la banquette en velours. Comme c'était agréable et doux au toucher ! Elle ne connaissait pas la sensation de cette étoffe chatoyante car elle n'appartenait pas au monde aisé. Cet homme si, cela se voyait à ses beaux habits, à son élégance et à sa distinction.
Plus tard, il fit arrêter le fiacre devant une vaste demeure en pierre blanche. La jeune femme suivit l'homme dans le grand jardin, admirative de cet endroit soigné et bien entretenu. Elle aimait particulièrement les parterres et les bosquets fleuris, les statues et les fontaines. Quel beau jardin ! L'homme l'invita à entrer dans sa demeure puis, une fois au salon, il appela le maître d'hôtel qui servit le thé et les petits gâteaux. Ce noble était Britannique, cela s'entendait à son accent bien qu'il parlait un français correct et distinct. Il vivait depuis plusieurs années en France et avait épousé la fille d'un bijoutier français de petite noblesse qu'il n'aimait pas. Leur mariage avait été arrangé par leurs familles, c'était l'usage à cette époque. Il proposa à la fleuriste de rester ici ; cela lui faisait de la peine de la voir tous les jours dans le même marché, dans les courants d'air, à vendre des fleurs pour quelques sous. Il lui offrait l'hospitalité, elle ne serait pas malheureuse et ne manquerait de rien. Mais tant de confort la mettait mal à l'aise et l'intimidait, elle ne se sentait pas à sa place ici. L'homme proposa également de loger ses parents, ils ne manqueraient de rien, tout comme leur chien et leur chat.
On alla chercher sa famille et les animaux en fiacre dans l'après-midi et on apporta leurs affaires ainsi que celles de leur fille. Leur maison fut relouée presque aussitôt. Le vieux couple était ravi de cette nouvelle existence. Ils ne connaîtraient plus la faim, la misère et le désespoir, enfin ! Ce qui les comblaient davantage c'est que leur unique progéniture avait elle aussi la sécurité, le confort. Ici ils seraient respectés et bien traités. Cet aristocrate était bon et généreux, plus que son épouse qui n'avait que faire de la présence de cette famille issue d'un milieu modeste.
C'était la fin septembre. Le jardin perdait de sa splendeur car toutes les roses étaient fanées. Il fallait attendre le printemps pour que le jardin retrouve toute sa beauté. A présent tout était terne, triste et morose. La jeune fleuriste regarda tomber la pluie. Même le ciel était triste. Elle s'ennuyait dans cette grande maison et vendre des roses lui manquait.
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Des voix qui résonnaient au loin... La jeune femme ouvrit les yeux... Que c'était-il passé ? Elle s'était évanouie et revenait à elle doucement. Elle ne savait plus où elle en était ni où elle se trouvait, perdue et hagarde... Elle regarda autour d'elle et reconnu les rues pavées, le quartier où elle vivait depuis sa naissance. Ainsi donc, elle ne se trouvait point dans le grand domaine du vieil aristocrate ?! Elle s'était tout bonnement évanouie et son imagination avait prit le dessus, inventant cette riche demeure et ce jardin fleuri. Elle vit la foule qui l'observait, agglutinée autour d'elle parmi lequel se trouvait le couple aisé qui lui avait acheté le bouquet la veille. L'homme au chapeau haut-de-forme noir était penché sur elle avec inquiétude car il se sentait responsable, l'ayant bousculé avec son fiacre. Heureusement elle n'était pas blessée, juste sonnée et apeurée. Il l'aida à se relever, tout comme son épouse. Elle reconnut la dame élégante vêtue d'une robe noire et dorée.
Que c'était-il donc passé ? Elle ne se souvenait plus... Le vieil homme lui répondit qu'il l'avait bousculé avec son fiacre et qu'elle avait perdu connaissance plusieurs minutes. Ainsi, elle avait tout imaginé sans le vouloir... Elle vit alors son panier vide sur le sol et les roses fânées, quelques pétales encore éparpillées sur la route pavée. Elle attrapa le panier vide et s'enfuit dans les rues. Elle en voulait à cet homme. A cause de lui, elle n'avait plus rien à vendre et rentrerait sans argent chez ses parents. Son coeur se serra en pensant à leur déception. Les larmes ruisselaient sur ses joues claires tandis qu'elle marchait.
Elle arriva dans le parc et s'asseya sur un banc pour se reposer et se calmer car tout cela l'avait stressé. Ses larmes séchaient. Elle ne prêtait pas attention aux passants qui allaient et venaient dans le parc, pressés et soucieux.
Brusquement, le vent se leva et emporta sur son passage les feuilles mortes, les chapeaux et les ombrelles. Le ciel sombre s'éclaircit un moment et les nuages firent place à un timide soleil. Après quoi, les nuages reprirent le dessus. Une pluie de roses se mit alors à tomber sur Paris. C'était inhabituel et beau à voir ! Le parc se recouvrit d'un immense tapis de roses. Roses blanches, rouges, roses et jaunes... La jeune femme se leva du banc et lâcha son panier vide. Elle regarda, admirative et fascinée, cette pluie florale. Spectacle unique empli de poésie, de magie et de féerie. Comme elle, les gens scrutaient le ciel avec étonnement. Cette fois-ci la fleuriste n'était pas évanouie, c'était bel et bien la réalité !
Dame Nature, dans sa grande bonté, avait décidé de lui offrir le plus beau des paysages. Toutes ces roses qui tombaient du ciel, amenées par le vent, c'était superbe. Il n'y avait plus qu'à les ramasser. La jeune fleuriste retrouva le sourire et à nouveau son coeur s'emplit de joie.
Commentaires
1. FREDCLOCLO le 01-10-2025 à 06:31:48 (site)
Une jolie histoire.... un peu longue, mais j'ai exceptionnellement tenu... qui ferait bien l'objet d'un beau dessin animé.
2. Jardin-des-vers le 01-10-2025 à 07:04:56 (site)
Bonjour chère Florence
Belle, émouvante et touchante histoire. Merci de l'avoir partagée sur ton blog.J'ai eu du plaisir à la lire.
Je te souhaite un très bon merecredi.Gros bisous
3. Pretulia le 01-10-2025 à 07:43:58
Bonjour ma Florence ! Très belle photo et histoire !! Nous voilà en octobre. Les jours, les semaines et les mois passent vite. Je n'arrive presque pas à suivre ! Aujourd'hui, il fera partiellement ensoleillé et jusqu'à 12 degrés. Je te souhaite un agréable mercredi et un bon mois d'octobre !Gros bisous de ton amie Pretulia
4. edelweiss47 le 01-10-2025 à 07:45:24 (site)
Bonjour ma petite Florence
elle est très jolie cette histoire
Je passe rapidement désolée de ne pas passer souvent
cette semaine, à cause des travaux il me tarde que tout
soit fini ca me rends malade de voir ma maison en chantier
fin des travaux début de semaine prochaine je vous souhaite
une douce journée bisous d'amitié
Marlène
5. princessedecoeur1 le 01-10-2025 à 08:41:42 (site)
Bonjour ma Flo et voilà Octobre avec du brouillard et 7°
Je suis cette jolie plume qui
Passe écrire chaque jour des
Petits mots parfumés
Et remplis de douceur simplement
Je te souhaite une très bon mercredi très automnale
Gros bisous de kiki ❤ ❤
6. lisia-44 le 01-10-2025 à 09:20:52
bonjour Florence
une belle histoire en ce jour
passe un bon moment avec ta maman
et profites bien de ta journée
bisous bisous
** lisia **